Ma femme et ma fille discutent au salon de l'inépuisable sujet des chats et des chiens. Et moi je lis Xénophon. Carrément. Le petit-fils occupe l'ordinateur. Ce sera dur de se concentrer. Surtout que tout le monde se fout, moi le premier, de mon commentaire de Xénophon (« La Voix étrangère »). Au moins Argos s'est-elle refusée à attaquer son ancienne alliée. Après avoir su ce que je voulais dire (« le marais d'Argos où fut trucidé l'Hydre est à présent un jardin de poireaux »), je mentionne la fin de l'Empire athénien, comme le proclame un sous-titre antérieur. Ne voilç-t-il pas mes Athéniens bloqués par terre et par mer ? En même temps, pour la première fois depuis deux jours, voilà mon chat autorisé à sortir, par la fenêtre de ma cuisine.
Ce matin j'avais la forme. L'amolissement général de ma vie me fait sombrer dans la mélasse encore aujourd'hui. Sur l'ordre communiqué par Pausanias, le second roi de Lacédémone. - eh oui ! Acréguié ! Voilà nos Athéniens sous la coupe des guerriers ! Une page de l'histoire qui se tourne ! Viendront Philippe, puis Alexandre ! Je n'aime pas l'histoire grecque : tout y est petit, mesquin, clocher. Après une concentration générale, id est « de troupes », Pausanias en prit le commandement, eins, zwo, die Spartiaten ! Et ça bâille au salon, et ça bâille ! Des guerriers, merde, pas des Marshmallows ! ...et les fit camper près de la ville, das l'Académie. Tout cela dans un mouchoir de poche, entre petites gens, au temps où le village valait le monde.
Où village valait monde. Plus tard, la croix gammée sur le Capitole ! C'est le nom d'un gymnase, dit-on entre crochets. Certainement donc une interpolation. Je ne parvien spas à me familiariser avec ces contextes grecs. J'ai appris cette langue trop tard. Mon père voulait le grec et ma mère l'anglais. Très tôt je n'eus que deux heures de grec sur trois. Mais toujours premier de la section, par subterfuge du professeur, qui aux autres comptait les fautes d'accents, et ne les comptait pas pour moi. Dès la troisième, le grec fut supprimé chez les garçons. Je me rendis au lycée de filles, paralysé de trac, sans que mes compagnes se soient jamais abaissées à m'adresser la parole, fière, hautaines, me rotant leur mépris sur la gueule du haut de leurs quatorze balais masturbatoires.
On me dit ensuite que c'était de leur part “une attitude” - comment donc, à quatorze ans moi-même, aurais-je pu même concevoir cela ? Cependant Lysandre, à peine arrivé à Egine, referma la tenaille. A bas les conseils quels qu'ils soient – chacun de t'ouvrir sa braguette du cerveau, ne suis jamais les conseils – rendit leur cité aux Eginètes – eh ! Ginette ! Combien valait-il mieux être sujet d'Athènes qu'Eginète indépendant ! ...dont il rassembla le plus grand nombre qu'il put – je crois parfois aux guerres périodiques, tous les dix ou quinze ans, pour vivr een paix sur la terre d'Israël, qui vient là hors de propos ; je ne crois pas aux Palestiniens ; nul dirigeant ne veut la paix – ô Lacédémoniens libérateurs, braves terre-à-terre, sommeil qui m'engourdit l'après-midi ! Et tous crièrent “Vive la liberté !” dans la petite île à présent toute construite, et les acclamations montent jusqu'au ciel, au point de foudroyer les oiseaux en plein vol, comme plus tard sous Flamininius ! ...comme il avait fait pour les Méliens. Partout des cérémonies de libération, discours, chants patriotes, lâchers de colombes... Comme s'il ne valait pas mieux se sentir parcelle d'un grand et noble empire, et tenir 500 ans ! ce qui advint à Rome – et pour tous ceux qui étaient dépossédés de leur patrie. Ce faisant Sparte émiettait la Grèce, les impôts baissaient ; jamais ce pays ne fut mûr pour l'unité, cela vint très tard, peut-être au temps des orthodoxes, enfin en 1821 ( Missolonghi – de la poudre et des balles. Puis, poursuit Xénophon, après avoir pillé Salamine – servons-nous au passage, camarades – il mouilla avec cent cinquante navires près du Pirée. Et sonnera l'hallali, plusieurs années d'horribles dictatures et règlements de compte.
Je m'en fous. Jamais vous n'aurez rien lu de tel - ...dont il se mit à interdire l'entrée aux navires de commerce. Je hais les hallalis. J'interromps les parties d'échecs. Mon roi se couche, ou bien, si je gagne, je prends l'air sombre et désolé. Je n'aime pas gagner. C'est vulgaire. Si les nazis sont sous les bombes, je prends le parti des nazis. Voilà une phrase qui me coûtera gros. Les Athéniens, encerclés par terre et par mer, se rendront-ils tout de suite ? Ne souffriront-ils pas de la peste d'abord, Périclès ne mourra-t-il pas ? Je confonds tout. Cette histoire m'est inconnue. Autant j'aime et connais la romaine, autant la grecque, encore une fois, me semble-t-elle un ramassis d'épingles indigestes – ne savaient que faire, car ils n'avaient ni vaisseaux ni alliés. On traite avec les vaincus.
Sauf avec les nazis. Je crois que les Israéliens ont tout de même gagné. Contre les nazis, je précise.