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F.Hernandez - Panique ta langue

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F.HERNANDEZ "PANIQUE TA LANGUE"


        ""Panique ta langue", cela donne "Nique pas ta langue". C'est du contrepet, c'est du verlan, ce langage qui consiste comme nul désormais n'en ignore à inverser les syllabes dans nos banlieues dites défavorisées. A noter que cette tendance existait déjà chez Stendhal, et à l'époque (qui est la sienne) de la Restauration, où les Bourbons, peu aimés, étaient appelés les "Bonbours".
De tout temps il a existé ddes langages secrets, des codes, depuis le langage des coquillards et des narquois du temps de Villon, jusqu'à l'argot d'entre-deux guerres, qui fait à présent partie du langage courant. Car c'est bien le drame : on ne veut pas être compris, et les bourgeois, les joibours, par désir de s'encanailler, ou les flics, les keufeus, par nécessité professionnelle, percent très vite les arcanes dudit langage mystérieux, et force est aux marginaux de s'en reforger un sur-le-champ.
C'est ainsi que le verlan, comme les autres codes, se voit dans l'obligation d'évoluer très vite, car les Inconnus et autres comiques s'en sont emparés. En 1997, on ne dit plus "bouffon", mais "bouffe-merde" ou "leurbran" - je vous épargne la traduction.
Toutes ces considérations et d'autres figurent dans le livre de la jeune Florence Hernandez "Panique ta langue", comme elles figuraient à leur époque dans Balzac puis dans Hugo (de façon plus systématique) à propos d'un ou plusieurs chapitres des "Misérables". Mais il serait dommage de s'en tenir à ces remarques sans grande originalité ; notre Florence, qui a étudié cette langue sur le terrain (elle a croqué, nous dit-elle, maints lapins, encore une expression savoureuse passée dans la langue de tous les jours), nous en livre un véritable lexique.
Ce glossaire figure, dans l'ordre alphabétique, à la fin du volume, paru aux Editions du Rocher, c'est-à-dire par copinage à Monaco, où la zone me semble très peu développée, quelque part... Mais vous avez aussi des chapitres classés au gré des circonstances de la vie quotidienne, où les paragraphes se succèdent comme un manuel de conversation. "Au café" (au féca), "En boîte", "La drague" (le plus pittoresque et, vous vous y attendez, le plus grossier de tous, ruez-vous-y, "A la maison". Ce dernier chapitre présente une surprise : les phrases en "bon français" sont traduites en verlan... à la lettre près demeurées en français d'origine.
C'est plein d'humour, mec. Parce que le vrai français est celui que les dits marginaux entendent tous les jours dans la bouche de leurs parents. Or lesdits parents n'étant pas nécessairement des PDG ou des chefs d'entreprise, il y afort à parier que le verlan ne constitue pas tant ni seulement une langue de déclassés (les parents le sont aussi bien) qu'un code malicieux de la jeunesse, opposée comme toujours à toute codification morale.
Ce code fonctionne parfaitement, et c'est volontairement que Kassovitz n'a pas sous-titré les dialogues de sa "Haine", je parle du film, pour nous montrer que "ces gens-là" comme dirait l'autre sont en réalité des gens de chez nous, et qu'il ne suffit pas de les rejeter par des sous-titres. Ce sont des Français, si l'on veut parodier Pasqua.
Tous ces garçons et ces filles écoutent "Hélène et les Garçons" pour se marrer, parce que les jeunes aseptisés de ces séries-là leur semblent s'exprimer dans un français qu'il comprennent parfaitement, qu'ils sont capables d'utiliser Dans leurs rapports avec vous autres les bien élevés, mais qu'ils  considèrent avec le même amusement que nous autres du bon côté les tournures surannées du Grand Siècle ; d'où leur hilarité devant les séries ci-dessus.


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