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Channel: der grüne Affe
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Logeuses, vieilles, coriaces

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Moi c’est l’ordre que j’aime. La logique. Pas la physique, les maths, toutes ces conneries (“moins par moins donne plus”, n’importe quoi ; pas besoin de ça pour mon poste de gardien - centième et dernier sur trois cent trente.) Le motard s’arrête en plein lacet, de là dégringole un zigzag de chemin blanc dans le crépuscule. “J’irai demain tronçonner de l’autre côté”, d’ailleurs j’avais sa tronçonneuse au cul attachée de biais : “Ce qui tombe ici ne remonte pas.” Il me dit qu’il couchera chez des amis ; que moi je dois attendre le bus ici. Il s’engage sur la pente frein moteur à bloc (autre absurdité) puis je me recule sous la falaise et à mi-gouffre à gauche il met plein phare : à droite, à gauche, à droite, vers le fond. Moi le bus je l’ai attendu quarante minutes.

C’est long quarante minutes quand la nuit tombe. Il ne s’est arrêté que pour moi: “Pourquoi vous n’êtes pas juste à l’arrêt ?” (cinquante mètres plus haut 10 m² de gravier pouvais pas savoir…) - la route se creuse, quatre vieilles sur les banquettes de flanc se grommellent des conneries de vieilles dans la ferraille, ma mère et ma vioque m’auront snobé d’un bout à l’autre. Alors je me lève, m’assois, titube d’un bras de fauteuil à l’autre en mimant le barbouillage d’estomac puis je me laisse tomber sur le siège dans le dos du chauffeur. Les vieilles dures à cuire me regardent à peine. Elles disent entre elles “ça ne vit pas vieux un homme, allez ; ça ne tient pas la route” (70 à l'heure en montée) – ou bien “on devrait arriver pour la soupe ; faudrait qu’il accélère.” Je dégueule - ES PROHIBIDO – “défense de parler au chauffeur” - je me retourne en m’essuyant les lèvres : “Quand est-ce qu’on arrive à Hemmes” - je prononce [émès] - alors une vieille en noir me demande - “quelle langue parlez-vous à la fin ?” - sabir de catalan, avec une bonne macédoine d’italo-portugais – je ne connais pas de langues à proprement parler : juste quatre ou cinq dialectes pour épater la galerie.

Mon Portos à huit heures demain matin sera sur l’autre versant à tronçonner ses arbres. Je replace ma main sur l'estomac, refais le geste de boire, toutes les vieilles me regardent et haussent les épaules, le car continue de virer - c'est un clown ès un original - para la paella riz safran crevettes y màs de gambas. Ma vieille me fait une proposition : Tengo una habitación para alquilar – chambre à louer : micro-ondes plaques électriques mini-four cafetière lave et sèche-linge vaisselle et ustensiles – génial je dis ès genial ça n'est pas très idiomatique son prix me convient elle ne parle plus repliée sur son loyer calculé au plus juste gagnant/gagnant meilleur rapport qualité prix "Cherche étudiant type européen, posé, aisé, visites non admises". “Il ne faudra pas faire de bruit j'habite avec ma sœur vous serez juste au-dessus de chez nous” ça promet J'espère me farcir les sœurs on m'a déjà fait le coup (la mère la fille effacées chat coupé, vieilles peaux tavelées) mais je n'escompte rien c'est ça qui fout tout par terre le calcul, ne pas calculer - juste le tant par mois.

Mon motocycliste à cette heure-ci bouffe du riz Andalùs avant d'aller se coucher tronçonneuse dans l'allée du lit nez dans l'oreiller chacun son métier y las vacas et les vaches - ça ne se dit pas (“seront bien gardées”) surtout espagnoles, je ne reverrai plus la tronçonneuse. La logeuse apprécie mon métier, mes revenus, la garantie de l'ordre public. “Dames 65 ans réputation intacte ch. Messieurs âge en rapport pas sérieux s'abstenir” - où dormir ? il n'y a pas d'hôtel à Hemnes, je devrais bien me couper les cheveux (brushing, extension, coloration) j'ai tout oublié c'est ma vie qui s'avance voilà GARDIEN STAGIAIRE.


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