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Lucidités et cécités

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Les entrevues que tu m'accordes encore me démolissent. Bientôt te démolissent aussi, car tu les appréhendes souvent, signe de leur nocivité. Si je te dis que je souffre tu te fous de moi : il n'y a que toi pour te hausser sur ces prétendus sommets. Djanem, je suis fatigué de servir de plastron à ta banalité populaire et de me faire prendre pour une bite à pattes, comme la plupart des hommes. Je t'ai trompée, humiliée, je t'ai enfoncé un couteau dans le ventre, je suis un plouc, j'ai des maîtresses à ne savoir les compter, pourri d'égoïsme : assez. L'acte d'amour ce n'est pas un type qui fait des va-et-vient dans l'humidité, c'est un don, un don mutuel, et non pas la femme qui offre, l'homme qui rafle. Tu m'as appris qu'une émotion d'amour valait acte sexuel - d'avoir écrit cela toute mon agressivité retombe, ce qui me remplit de honte. Ce que tu dis est très commode, et permet de se passer de toutes ces bestialités. Un jour sans doute les scientifiques, nos belles âmes, inventeront une jouissance bien meilleure que le sexe, et bien plus infaillible ; mais en attendant, nous devons bien nous contenter de ces espèces de poires à jus au bas du ventre qui nous tiennent lieu d'instruments de plaisir.

 

Un homme, un être humain, ne supporte pas de voir ses organes sexuels piétinés et moqués de la sorte. Il faut vraiment que je sois masochiste pour me laisser traiter ainsi comme le dernier des derniers sous prétexte que j'ai tiré un coup de trop ailleurs. Quel coup, d'ailleurs ? Trois secondes avant détumescence. Ce ne sont pas les actes qui comptent, certes ; mais la vérité, la réalité, c'est toujours que je dois fermer ma gueule. Sacha Guitry faisait répéter les insultes, feignant de ne pas les avoir bien comprises. L'insulteur atténuait toujours, très gêné, ses propos. Je ne comprends pas pourquoi je ne te laisse pas tomber après toutes ces injustices que tu m'as faites. J'apprends que tu exposes ainsi tes façons de m'attaquer, simples exposés, ressassements de ta souffrance, qui ne concernent pas mon esprit : ces cruelles ironies ne me concernent pas. « Les souffrances que je t'inflige ne sont que la preuve extrême que je t'aime ». Très peu pour moi. Torsions indéchiffrables. Admettons même que pour Djanem, tout homme soit un coureur. Exact. Mais je serais bien embarrassé de passer à l'acte, voir plus haut.

 

 

 

 

 

R. 42 X

 

 

 

 

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Premiers flirts en voiture Place Chasles : « Tu te rends compte du caractère sacré des paroles que nous avons échangées, là ? » Cela sert d'argument de part et d'autre : “Comment veux-tu qu'après avoir proféré de tels discours nous puissions désormais les profaner par un éloignement ?” Il se peut, Djanem. Paroles sacrées, paroles. Mais tu auras du mal à retrouver ma confiance, mes roulements de chien offrant son ventre vulnérable, malgré les avanies dont j'ai été abreuvé sur à peu près tout : mon appartenance au sexe masculin, ma profession de maître, ma lâcheté, mon inaction, alors que tu m'interdis d'intervenir en quoi que ce soit. Je ne veux pas d'action. Quelle qu'elle soit. Elle ne sert à rien, n'avance à rien. Vraiment vivre, aimer vraiment, avec des actions communes, quelle dérision...

 

 

 

 

 

X

 

 

 

Lazarus , lui, est un homme : il a piétiné tous ceux qu'il a pu pour réussir. Tu n'avais pas le droit de te confier à ce baltringue. Si vite. Une heure d'entretien. Tu couches avec lui à présent, si même tu n'y es pas revenue, comme un chien à sa vomissure. Lazarus disait « Il te le fera payer. » (tout ce que 'jai souffert comme tout le monde) : pauvre analphabète ! Nous faisons tous payer ce que nous avons vécu, à tout le monde ! « Il te le fera payer » - mais évidemment, que je fais payer mes incapacités ! Et plutôt deux fois qu'une ! Coureur, moi ? Collectionneur de râteaux ! Qu'ai-je donc de commun avec ce personnage de carnaval ? Je n'ai pas été capable de l'égaler ! Même en ignominie  ! car sachez-le bien, petits enfants : celui qui suit les préceptes de morale, celui-là se fera toujours baiser, quoi qu'il fasse. La morale est faite pour que les forts, toujours, les rusés, en toutes cironstances, l'emportent ; pendant ce temps, les gens pleins de morale se frottent la modestie avec satisfaction devant le miroir ou devant Dieu, qui es tle plus grand miroir. Déformant. Là encore, notre Lazarus voit des gens marcher, puis découvre qu'ils mettent un pied devant l'autre. Qu'il le fasse ! Soit ! Mais qu'il n'en fasse pas des gorges chaudes, comme s'il renvoyait au néant les pauvres cons qui marchent, devant Sa Suffisance Devineresse, qui elle, bien entendu, ne marche pas, et, du haut de son honnêteté, de haut de sa pureté, ne fait rien, n'a jamais rien fait payer à qui que ce soit.Un autre « mot » de Lazarus, quand il désapprouve l'agitation d'autrui : « Mais – ton doctoral – est-ce qu'il ne se la raconte pas, là ? est-ce qu'il ne se la joue pas ? » Ô grand philosophe ! Tout le monde se la joue ! Sans exception ! Toi compris ! Et que ferions-nous donc nous autres, coupés de la vérité, si nous nétions pas tous en train de « nous la péter » ? Ô grand logicien ! Qui vois les autres marcher, mais qui les désapprouve, d'un ton supérieurement goguenard : « Mais est-ce qu'ils ne seraient pas tout simplement en train de mettre un pied devant l'autre ? » Bien vu, ô grand sage, ô forte cervelle...)

 


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